Pensée…

La lecture de La fragilité de Miguel Benasayag a mis des mots sur une pensée qui m’était intime concernant l’Homme et le monde, aujourd’hui.

Cette lecture ne cesse de ricocher alimentant ma recherche artistique.

Elle m’a permis de dégager différents axes dans cette pensée :

 

  • L’homme situé

Le mythe de l’individu, a crée dans nos sociétés occidentales, cette idée de l’homme conçu comme un « électron libre ». Au libre arbitre sans limites, cet individu existerait en soi pour soi, isolé de tout environnement, devenu décor.

Or, la personne n’est pas un individu isolé.

L’être humain est un être situé.

Situé dans un environnement, une situation, une culture, un paysage, une époque…

«L’environnement prolonge le corps et le corps prolonge l’environnement. »

« La personne existe là comme paysage, et le paysage est la personne. »

(Le géographe, Augustin Berque)

Comment rendre cela visible ? Palpables ces liens ?

L’homme acculé par le travail, la rentabilité, l’utilitarisme généralisé, plus que jamais, a un besoin vital de reconnecter avec son environnement, avec lequel il est ontologiquement lié.

 

  • Utilité de l’inutilité

L’homme moderne occidental poursuit des objectifs, se fixe des buts, il est en perpétuelle recherche d’efficacité, de rentabilité.

« L’homme des sociétés possédées par la technique aurait tendance à croire que toute chose ( y compris lui-même) existe avec une fonction concrète et utilitaire, lisible, déclinable. » Ainsi nous en arrivons à l’absurdité « l’utilité comme raison de vivre ». M Benasayag

De l’inutilité: je souhaite ouvrir un espace de recherche, sans but, s’érigeant comme un espace de résistance.

Ce laboratoire de l’inutilité n’a d’autre « objectif » que de ne pas en avoir.

L’acte de création est auto-justifié.

 

  •  ici et maintenant

L’homme situé est un homme ancré dans un ici et maintenant qui nous permet d’habiter le présent.

Outil de base de mes recherches la composition instantanée (composer dans l’instant présent) est pour moi une forme portant en elle-même les éléments fondamentaux de mon positionnement au sein de notre monde.

Au temps de l’omniprésence (l’omnipotence) des multi vidéo-conférence, de l’absence-présente, ou l’immédiateté remplace le présent; le « ici et maintenant » apparaît comme un acte (asbeen) de résistance.

Devant un public elle renforce le lien, donnant à voir, à sentir, ce vous/moi, histoire qui s’écrit ici et maintenant.

 

  • L’homme est un être multidimensionnel

L’être humain n’est pas unidimensionnel. Il n’a pas de « noyau/conscience » qui contiendrait ce moi unique, clair et défini.

Des nombreuses souffrances viennent de cette négation de notre multiplicité.

Reconnecter avec notre multi-dimmensionnalité par le corps, le mouvement.

 

  • Modification significative « du sujet » par les nouvelles technologies

Au temps de l’omniprésence par multi vidéo-conférence-intercontinentale, à l’ère du virtuel, et de la technologie qui colonise jusqu’aux sphères de notre intime, où se situe le vivant ? Le « ici et maintenant » ? Le « ensemble » avec et dans un environnement dont nous faisons partie ?

L’homme de la technique n’est plus le même homme que celui qui savait entretenir une certaine amitié avec la nature, mais aussi avec lui-même, avec sa propre fragilité. Le monopole de la technique l’a coupée de lui-même, par une méconnaissance ou un « dressage » de son corps.